Une étude auprès de 394 personnes accompagnées par Emmaüs Connect mesure pour la première fois les effets de l’inclusion numérique sur la situation des publics en précarité.

Aboutissement d’une série de quatre évaluations d’impact menées auprès des principaux publics d’Emmaüs Connect – bénévoles, structures sociales, travailleurs formés, personnes bénéficiaires, soit 901 répondants au total – , cette étude rend compte des effets concrets de l’inclusion numérique et de pistes d’améliorations dans l’accompagnement des publics en situation de précarité numérique et sociale. 

Etude d'impact 2022 Emmaüs Connect

Une approche « terrain » qui a mobilisé toutes les antennes de l’association

Cette évaluation finale coordonnée par le cabinet Archipel&Co, sans doute la plus cruciale, s’est articulée en trois temps : la relève des données actuelles d’Emmaüs Connect d’abord, puis une étude qualitative via des entretiens individuels et enfin une étude quantitative à travers des « face à face » avec des bénéficiaires et des formateurs. 

L’échantillon de l’étude, qui concerne 394 personnes accompagnées chez Emmaüs Connect, est représentatif des publics accueillis par l’association ainsi que des trois grands types de solutions solidaires proposées : les parcours d’initiation, les permanences connectées et la vente de crédit mobile ou d’équipements numériques à tarif solidaire. 

De nombreux bénévoles de toutes les antennes ont été mobilisés afin d’interroger dans les meilleures conditions ces différents profils de bénéficiaires : 72 en fin de parcours d’initiation, 126 en fin de permanence connectée, 196 en fin de vente.

 

À l’issue des accompagnements, une meilleure autonomie et un recours aux services administratifs plus élevés

Six mois après leur accompagnement, sous la forme d’un parcours d’initiation en groupe ou d’une permanence connectée individuelle, 74% des bénéficiaires disent savoir envoyer un email et 67% savent faire une recherche sur internet de manière autonome. L’accès à internet et la meilleure compréhension de l’outil leur permet également de pouvoir accéder à davantage de services dématérialisés : 61% des bénéficiaires déclarent réaliser plus de démarches en ligne et 60% ont été remobilisés dans leur recherche d’emploi.

 

L’impact immédiat de la mise à disposition d’équipements et de moyens de connexion à prix solidaire

Alors que l’accès à de l’équipement numérique (ordinateur, smartphone, tablette) et à des moyens de connexion (forfait téléphonique) reste encore un obstacle majeur pour 12% de la population (Insee, 2019), on constate l’impact direct de la mise à disposition de cartes prépayées et de matériel à tarif solidaire dans nos points d’accueil : 84% des personnes qui achètent des recharges affirment être plus proches de leur famille et de leurs amis.

C’est aussi une économie considérable qui permet de mettre le numérique à la portée de tous les budgets : grâce au matériel issu du réemploi solidaire via le réseau de LaCollecte.tech notamment, le montant nécessaire pour s’équiper baisse de 80% en moyenne pour un ordinateur et de 66% pour un smartphone. Beaucoup de bénéficiaires acquièrent leur tout premier ordinateur personnel chez Emmaüs Connect. Pour ce qui est des recharges de crédit mobile, indispensables pour les personnes mal logées ou non-bancarisées qui ne peuvent souscrire de forfait à domicile, elles permettent de réaliser environ 200€ d’économies par an.

 

Le lien humain, facteur essentiel de la progression des personnes en difficulté

« Notre action, c’est 80% d’humain, et 20% de numérique », disait un bénévole référent depuis plusieurs années au point d’accueil Emmaüs Connect de Saint-Denis. Nous ne croyons pas en effet à l’apprentissage isolé et individuel du numérique, mais à la force de l’écoute et de l’entraide chères au mouvement Emmaüs.

Ce modèle, qui est rendu possible par l’action de nos 1 400 bénévoles, semble fonctionner pour la quasi-totalité des bénéficiaires : 97% des bénéficiaires accompagnés déclarent avoir plus confiance en eux à l’issue de leur accompagnement et 95% des bénéficiaires ayant participé aux parcours d’initiation estiment avoir beaucoup progressé.

La nécessité d’accompagnements longs pour mener les publics vers une grande autonomie

Certaines données nous obligent toutefois à nuancer l’ambition d’une autonomie complète de tous les publics accompagnés. Comme l’illettrisme, l’illectronisme se combat sur le long terme : après l’acquisition des bases et l’appréhension des outils numériques, il faudra pratiquer pendant plusieurs mois voire des années pour devenir complètement autonome dans l’utilisation d’un ordinateur. Ainsi, ce ne sont que 38% des bénéficiaires qui estiment, six mois après leur accompagnement, qu’ils pourront « tout à fait » se passer d’aide sur les techniques apprises. L’inclusion numérique et sociale exigera, dans les années à venir, un investissement toujours plus important pour soutenir ces apprenants du quotidien.

Infographie Etude d'impact Beneficiaires 2022