Emmaüs Connect publie le premier état des lieux de la précarité numérique des primo-arrivants en France. Cette étude propose également des pistes d’action concrètes pour permettre aux acteurs de la solidarité et aux décideurs d’améliorer l’inclusion numérique et sociale des publics migrants.

Etude d'impact 2022 Emmaüs Connect

Depuis plusieurs années, les conditions d’arrivée des primo-arrivants en France se dégradent. Demande d’asile, prise de rendez-vous avec la préfecture, communiquer avec ses proches… tout se fait en ligne. Sans accès à un équipement numérique et à une connexion abordable, ces démarches essentielles et nécessaires à l’intégration des réfugiés sont impossibles. Cette situation est devenue intenable, en premier lieu pour les publics concernés, mais également pour les acteurs de la solidarité qui doivent sans cesse combler le fossé numérique provoqué par cette dématérialisation.

C’est pourquoi Emmaüs Connect a répondu en 2020 à l’appel conjoint de la Délégation interministérielle à l’accueil et à l’intégration des réfugiés (DIAIR) et de la Direction de l’intégration et de l’accès à la nationalité (DIAN) pour mener avec 11 autres structures lauréates un projet exploratoire de plusieurs mois. Objectif : interroger les publics concernés et les travailleurs sociaux pour recenser leurs besoins et développer un parcours d’inclusion numérique spécifique.

De nombreux freins à l’inclusion numérique des réfugiés

Vivre sans accès au numérique et à internet est aujourd’hui un casse-tête pour des millions de Français. Pour les réfugiés, les obstacles sont encore plus nombreux. A leur arrivée en France, 90% des bénéficiaires de la protection internationale interrogés possèdent un smartphone, tandis que moins de 50% possèdent un ordinateur. Pourtant, de nombreuses démarches administratives ne sont accessibles que sur ordinateur. Certains vont alors s’équiper quitte à s’endetter pour pouvoir accéder à des formations professionnelles et réaliser des démarches administratives.

A cette difficulté d’accéder à un équipement numérique adapté et abordable, s’ajoute la barrière de la langue. Sans maîtrise de l’alphabet et de la langue, il est très difficile voire impossible de se repérer sur une interface virtuelle ou bien même d’utiliser un clavier. D’autres freins psychologiques (manque de confiance, peur des dangers d’internet, troubles psychologiques liés à un parcours migratoire chaotique) entrent aussi en jeu face aux outils numériques. Mais les publics migrants ne demandent qu’à être formés et souhaitent monter en compétence.

 

Déterminer les outils pédagogiques les plus adaptés 

En identifiant et en prenant en compte ces freins, cette étude exploratoire a permis de déterminer des spécificités pédagogiques et de mettre en place des solutions concrètes pour favoriser l’inclusion numérique des réfugiés.

Emmaüs Connect propose désormais un nouveau parcours d’accompagnement sur mobile et tablette, plus faciles d’accès pour les réfugiés. Cet accompagnement s’adapte aux besoins des migrants en prenant en compte le niveau numérique et linguistique dès l’entrée du parcours. Il s’appuie sur une méthodologie simplifiée et des séquences pédagogiques thématiques.

Des modules de formation à destination des publics migrants sont déjà disponibles sur Les Bons Clics gratuitement :

  • naviguer sur internet
  • utiliser les applications mobiles
  • gérer une boîte mail et des fichiers (utiliser une boîte mail, voir et gérer ses fichiers, ouvrir et envoyer une pièce jointe par mail).

 

Pistes d’action pour faciliter l’accompagnement des aidants et travailleurs sociaux

L’acquisition de compétences numériques de base permet de renforcer nettement le sentiment de confiance en soi et de lever les blocages psychologiques, qui sont les plus pénalisants. Notre récente évaluation d’impact en est une illustration : 97% des bénéficiaires se disent plus en confiance à l’issue d’un accompagnement. Pour autant, cette assurance ne s’acquiert qu’en appliquant le principe de « faire avec » plutôt que de « faire à la place de ». Les aidants et travailleurs sociaux qui accompagnent les réfugiés au quotidien jouent un rôle essentiel à ce sujet.

C’est pourquoi Emmaüs Connect a fait le choix de proposer deux modules de formation à destination des aidants et travailleurs sociaux : l’un sur le diagnostic de la précarité numérique et l’autre sur les bonnes pratiques d’accompagnement des publics en séance individuelle et collective.

Une trentaine de travailleurs sociaux ont participé à ces formations. A l’issue, la plupart d’entre eux ont indiqué vouloir faire évoluer leurs pratiques afin de davantage « mettre en avant les aspects positifs du numérique, mieux diagnostiquer le niveau des personnes accompagnées ». Si les travailleurs sociaux manquent souvent de temps pour participer à ces formations, il est nécessaire de proposer des modules pédagogiques adaptés à leurs besoins et à leurs contraintes professionnelles.

Accélérer la formation des travailleurs sociaux, renforcer l’accès à l’équipement numérique et proposer des accompagnements adaptés aux besoins des publics migrants sont autant de solutions qui faciliteront l’inclusion, à la fois numérique mais surtout sociale, des réfugiés.